
Dans la province orientale de l’Ituri en République démocratique du Congo, la peste bubonique fait un très inquiétant retour ces derniers mois après avoir disparu depuis plus de dix ans. Une maladie séculaire qui apparaît dans des régions pauvres et qui a été signalée également au Pérou et à Madagascar, alerte l’UNICEF.
En RDC, la province de l’Ituri est particulièrement touchée et une étude enregistre 490 cas de peste entre 2020 et 2021 dont 20 décès sur les zones de santé de Biringi, Rethy et Aru. Sur l’ensemble de la province de l’Ituri la peste a provoqué la mort de 44 personnes et 578 cas ont été relevés durant cette même période.
La pauvreté cause des drames humains, des épidémies évitables
Une grande pauvreté provoque une épidémie de peste en réunissant plusieurs facteurs donnant la possibilité à la maladie de circuler et de contaminer des habitants pauvres.
Le manque criant de moyens financiers ne permettant pas la construction d’infrastructures d’assainissement, de traitement des déchets, des constructions de bâtiments agricoles sûrs et garantissant la santé des habitants – provoque des épidémies de peste véhiculées par les rats porteurs de puces et rodant autour des habitations pour trouver de la nourriture. Des puces porteuses de maladies dangereuses qui contaminent le bétail et les animaux domestiques qui à leur tour vont contaminer les habitations où ils se trouvent.
Les familles très pauvres ne peuvent s’offrir des locaux agricoles hébergeant le bétail et les denrées liées à l’élevage et aux divers produits récoltés. Puis, par peur des vols, les familles ne peuvent laisser dehors certains animaux d’élevage et domestiques. De ce fait, ils se trouvent souvent à l’intérieur de maisons au toit de chaume et au sol en terre battue, ce qui facilite la transmission de puces contaminées aux habitants qui, faute de pouvoir posséder des lits, dorment à même la terre battue qui constitue le sol de leur maison.
Les enfants sont ainsi victimes de la peste en étant piqués par les puces et il est alors parfois la difficulté pour les familles de se rendre dans un centre de santé, et de choisir une médecine différente des traitements traditionnels. De plus, il faut pouvoir identifier rapidement les symptômes car la maladie peut très vite se propager dans l’organisme.
Une grande pauvreté, des conflits provoquant de nombreux déplacements contraints pour des familles, la crise climatique s’ajoutant, font que pour ces populations très vulnérables et touchées également par le paludisme, et qui peuvent affronter des épidémies de choléra, de rougeole, Ebola, des fièvres, entre autres maladies, ne peuvent réagir efficacement pour éliminer la peste, se protéger, protéger la vie de leur famille.
L’UNICEF transmet le message de Yako Adhiku, 40 ans, qui vit dans la ville d’Aru dans une de ces petites maisons au sol en terre battue. Sa fille âgée de deux ans a été atteinte de la peste et elle a rejoint en urgence un centre de santé pour qu’elle puisse recevoir des antibiotiques pouvant la soigner. Une maladie issue de la pauvreté et qui aggrave le cercle infernal de la pauvreté. « L’existence même de la peste ici nous rend pauvres » explique à l’UNICEF Yako, qui ajoute, « je dois m’occuper de mon enfant malade et je n’ai donc plus le temps d’aller dans les champs et de cultiver. »
Un rapport du CASS indique les difficultés pour les populations pauvres de se protéger de la peste et parmi elles figurent également les conséquences de la pandémie de Covid 19 qui, par les mesures sanitaires prises, ont aggravé les conditions de vie et de ressources des populations vulnérables. Très fragilisées par les violences multidimensionnelles frappant en permanence les populations abandonnées par notre économie et nos politiques de prestige et électoralistes qui ont les moyens d’investir des millions dans des campagnes électorales et pour un PIB élevé provoquant alors d’autant plus une grave instabilité.
D’un côté la souffrance d’enfants pauvres et de l’autre les ambitions de pouvoir et d’enrichissement de puissances politiques. Comme quoi ce que l’on croit être le plus puissant est le plus petit et ceux qui sont si fragiles sont le plus important, sont la réalité de la vie – ce que signifie nos systèmes fabriquant la pauvreté. Les valeurs revendiquées par les politiques des pays riches sont-elles si justes et sincères ?
D’autre part, les infrastructures de santé ont des capacités limitées de dépistage de la peste, ce qui retarde le diagnostic car les médecins ne peuvent accéder à des tests établis par des laboratoires et permettant le suivi précis des malades en pouvant évaluer la progression de la maladie.
Une maladie « hautement infectieuse » qui pourrait atteindre les territoires transfrontaliers
Il existe d’importants mouvements de déplacements par notamment les conflits persistants ce qui pourraient permettre une transmission transfrontalière de la maladie. « Des cas de pestes bubonique et de peste pneumonique hautement infectieuse – qui se transmet par voie aérienne – ont été signalés dans des zones précédemment exemptes de la maladie, près de la frontière du Soudan du Sud et l’Ouganda, à l’est de la province » alerte l’UNICEF
SOS – L’UNICEF lance un appel pour soutenir les populations touchées par la peste
La pauvreté est la première cause d’une épidémie de peste et les enfants sont les premières victimes. Il est alors primordial de pouvoir construire des maisons sécurisées où les rongeurs et insectes dangereux ne peuvent pas accéder, de fournir du mobilier pour protéger la nourriture et de la literie pour que les habitants ne dorment plus par terre. Il est aussi essentiel de lancer une campagne d’éradication des rats et des puces.
Il est possible de fabriquer des meubles avec des matériaux locaux car il est de protéger au mieux et rapidement les enfants. « Nous voulons donner aux parents les moyens, dans la mesure du possible, de fournir des lits aux enfants et d’empêcher les jeunes de devoir dormir sur le sol où ils sont plus exposés à la peste par des piqûres de puce » souligne Mme Scott Moncrieff, responsable de la cellule d’analyse des sciences sociales.
Il est également important que les habitants vivent dans un environnement sûr « en disposant des ressources nécessaires pour conserver leur nourriture et leur bétail en toute sécurité dans des bâtiments distincts de ceux où ils vivent et dorment » précise la responsable.
Chacun selon ses moyens peut répondre à cet appel à l’aide de l’UNICEF pour sauver des vies, pour offrir aux enfants un présent heureux et non celui imposant des souffrances par les violences , dont des maladies évitables au 21ème siècle.
© Fédora Hélène
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Une réflexion sur “Retour alarmant de la peste dans la région de l’Ituri en RDC – alerte l’UNICEF”