
Rapport Sauvé – Violences sexuelles dans l’Église catholique – France 1950-2020
Reprendre son souffle, pousser cette lourde porte quand la peur saisit. C’est la porte d’une église où l’Angélus ne sonne plus quand les rêves espèrent encore, quand la vérité se fait lumière consolatrice pour ces enfants blessés, pour cette mémoire qui se souvient de la violence. Les mots ne se trouvaient pas pour témoigner que ceux s’écrivant en sanglots. Les blessures déchiraient le cœur, celui qui au cœur des plus vulnérables reprend le sourire du chant de la vie pour survivre. Il murmure doucement au profondeur du chagrin qui s’éveille soudain et inonde le visage de cette souffrance jaillissante. Les prédateurs sexuels se courbant à l’ombre des cathédrales qui triomphaient et ce cierge d’une victime, allumé pour panser les souffrances dites et l’indifférence fermant la lourde porte sur les enfants témoignant.
Une flamme en secours quand le monde s’éteint, quand les victimes de prédateurs sexuels survivent, hissent leur vie au-dessus de ce qui détruit, savent que leur voix n’est jamais entendue, leur parole à l’écho des gouffres et que la patience garde pour force du témoignage au jour qui le libère. Une église et sa lourde porte ancienne, cette clé gigantesque la fermant, ce dehors au vide et les victimes en silence marchent toujours, crient leur douleur, prouvent leur peine, sans relâche, l’oubli n’est pas, on n’efface pas un être humain.
Ces siècles où la religion s’invente, domine, endoctrine, est ce pouvoir politique, transforme la bonté en mensonges, qu’il est ces vies détruites et dans la peine : le corps meurtris. Ces corps humains et non divins, ces corps sacrés par la vie que des prédateurs sexuels aux larges manipulations usant de la foi, de l’amour pour ne servir que leur criminalité, et créant cette mise en scène pour garantir leur impunité, – se jouent et le feront jusqu’à la fin pour colonne vertébrale de leur vie. La dignité de la vie, l’immensité de sa liberté , nous avons la responsabilité de la protéger et de la transmettre. S’il était le divin, il serait ce coeur humain conscient de savoir aimer, et par cette sensibilité, conscient que l’amour ne met pas en souffrance, qu’il brave la mort puisqu’on aime toujours si fortement ceux partis, ceux martyrisés par la cruauté de certains hommes et ayant perdu la vie par cette arme des violences.
La religion pourrait être juste cette reconnaissance de la sensibilité, de l’essentiel du verbe aimer que possède chaque être humain, chaque vie se battant pour survivre, comme dans cette conscience, l’eau est un élément vivant. Ce lien fondamental de l’un à l’autre fait perdurer notre monde. Les prédateurs sexuels sont alors cette barbarie destructrice sans sens, sans écho , sans lien et tentant de prouver l’existence du vide, de ce qui n’est plus, ce fléau du néant dans un geste de violences sans aucune intelligence que cette impulsion de détruire pour son propre plaisir.
Le catholicisme à l’ordre patriarcal, les enfants et les femmes, mis en position d’infériorité et l’hypocrisie des ordres s’impose, sert toujours certains rangs nourrissant cette haine farouche pour la liberté tant elle remet tous les pouvoirs en question, qu’elle leur demande de ne plus être, de ne plus imposer de carcan, de pensée fermée et de s’ouvrir à un nouveau fondamental.
La liberté est l’ennemi de ceux voulant dominer autrui par la violence. Des victimes emprisonnées à ciel ouvert que les prédateurs et ceux les légitimant traitent avec mépris, indifférence. Des victimes qu’ils se plaisent à renier en dernière souffrance qu’ils leur infligent. Mais, il est cette flamme, une victime qui passe devant une église, la peur, la lourde porte, elle s’éloigne et avant de partir, elle a eu cet espoir pour la paix, elle a vécu profondément en elle cette force de la liberté et des années après le drame de violences sexuelles subies, le témoignage est vivant.
Témoigner est cette résistance, celle au quotidien qui se révèle par la volonté de vivre, de chaque jour se lever, d’avancer, de faire des projets, d’aimer, d’aimer si fort, qu’il sera un jour où tout resplendit et où la parole est écoutée, est liberté et rien ne peut l’arrêter. Le silence qui se brise, c’est grâce au courage des victimes. Sans elles rien n’est possible. Leur témoignage est ce trésor de la vérité. Ce sont les victimes qui ont tenu le choc année après année, ce sont elles qui portent l’immense peine, ce sont elles qui la révèlent pour la paix. Apaiser les douleurs et vivre sans avoir à dépasser chaque jour le drame des violences sexuelles subies, tout doit l’accorder aux victimes.
C’est le corps qui ressent chaque jour cette plaie qui ne peut se refermer, cette plaie qui détruit, et aujourd’hui encore la justice ne progresse pas de manière radicale pour sauver des vies, pour entendre les milliers de victimes de prédateurs sexuels sévissant chaque année.
Le rapport Sauvé met les témoignages des victimes au cœur de son travail, au cœur des possibilités
La Commission indépendante sur les abus sexuels dans l’église (CIASE) a recueilli la parole des victimes durant 17 mois. Une parole essentielle sans laquelle la Commission ne peut mener à bien son enquête.
Une enquête qui entendra des centaines de témoins, et qui prendra connaissance de milliers de témoignages écrits. Les victimes sont les leaderships du progrès mettant en place tout ce qui est possible pour protéger les plus vulnérables, pour anéantir les violences sexuelles. Par leur expérience, réflexion, analyse, par l’immense travail qu’elles font pour donner les moyens à la société de protéger, de sauver le plus efficacement possible les plus vulnérables, pour faire en sorte que les moyens soient mis en place pour que de tels faits ne se reproduisent plus. Les victimes sont la chance pour notre société de grandir vers la paix, vers une justice véritable écoutant avec empathie le témoignage des victimes de violences sexuelles pour leur donner leur droit à la reconnaissance et à réparation.
La reconstruction, une victime l’acquiert par la générosité qui est en elle, par la connaissance de la souffrance, de la force de la vie qui sauve pour que « plus jamais ça » soit rendu possible.
Plus jamais ça – Jean- marc Sauvé, Président de la CIASE, exprime en préface, « Nous souhaitons aussi partager ce recueil avec les femmes et les hommes, qui, dans l’Église catholique et en dehors, veulent prendre la mesure du désastre qui s’est produit, de ses causes, de ses effets, afin que tout soit mis en œuvre pour que de pareils événements ne puissent plus se reproduire. »
Prendre conscience du terrifiant des violences sexuelles commises sur des mineurs, comme celles commises sur toute personne vulnérable, pour avancer véritablement vers une humanité capable de grandes choses et en premier par la réalisation de ne plus jamais blesser un être humain, qu’il ne soit plus ce moteur de la prédation que des hommes activent en eux pour détruire des vies.
Les témoignages sont faits par les victimes sur différents supports. Ce sont des poèmes, des ouvrages autobiographiques, – le tout plus souvent non publiés par une maison d’édition, – ce sont des dessins, des courriels, des courriers, où des victimes témoignent des violences sexuelles qu’elles ont subies, comme des témoins de violences peuvent également témoigner.
La commission a réalisé une écoute attentive, un travail de recherche à haut niveau pour établir le chiffre dramatique : au moins 330 000 enfants ont subi des violences sexuelles depuis 1950 par des religieux ou dans des lieux liés à l’église. L’institution religieuse catholique s’avère donc être avec les cercles familiaux ou amicaux, un des lieux les plus dangereux pour les enfants.
Les prédateurs sexuels manipulent avec la figure dominante du prêtre ayant autorité et portant une puissance en lien avec ce droit divin, cet amour divin qu’il revêt obligatoirement par son titre, dont il est le dépositaire. Par également l’endoctrinement, le regard qui est posé sur le corps humain qui peut être considéré comme impur, comme le jugement sur le corps des femmes – la virginité sacralisée et fuyant toute vérité scientifique, la religion rejetant sur le vivant une idée autoritaire du péché.
Une sexualité interdite, torturée, où la femme est l’emblème du pêché, où l’enfant se doit d’obéir coûte que coûte, où il doit être ce silence perpétuel, -l’enfant : celui qu’on n’entend pas, celui qui récite sans avoir le droit à la connaissance extérieure, au sens critique, et qui dans un enfermement organisé devient la proie idéale.
Une ou un adolescence qui ignore encore ce que signifie la sexualité, qui est à l’âge de découvrir les premiers amours, les flirts et qui n’aura pas le temps de donner la main à une amie ou un ami de cœur. Il ou elle n’aura pas le temps de rire, de pleurer, de s’émouvoir, de vivre les premiers chagrins d’amour, tout lui sera volé par la violence d’un prédateur ayant autorité, étant cet effrayant, ce qui paralyse et qui sera cette intense souffrance. Les rêves si jeunes et déjà ils se perdent, déjà il faut les accrocher pour qu’ils ne meurent pas eux aussi.
Témoigner : ce cri dans les ténèbres
Des témoignages difficiles à écrire pour les victimes, et prenant parfois des années avant de pouvoir se rédiger, sont envoyés à la CIASE qui les transmet dans son rapport. Écrire avec pudeur, dignité – comment dire et ne pas dire ce qui détruit ? Ce corps blessé, cette douleur toujours présente, ce point qui est là lancinant et comprendre ce qui est cruel également, qu’un prédateur se fait plaisir. Il se fait du bien en agressant.
On ne parle pas alors de cette petite pièce que l’agresseur plongeait dans le noir. On voit à cet instant la violence des actes de l’agresseur, son visage, son ombre qui devient celle vous dominant, effaçant tout du décor extérieur, il ne reste plus que sa masse, ses traits, son reflet, ses gestes et la souffrance.
Puis, il est ce blackout et les douleurs se rappellent à la mémoire, il n’y a pas d’explication, mais pourquoi a-t-il fait ça – pourquoi, une phrase complète qui fait tant de mal. Le prédateur ne donne aucune explication, il vole la vie en maître, il possède, c’est tout. Pour lui cela suffit à briser une ou un enfant, une ou un adolescent ou une personne vulnérable.
Écrire à l’encre des larmes

« Voilà maintenant quatre ans que j’ai commencé à ébaucher cette lettre et je suis enfin arrivé à la terminer », écrit un témoin à la CIASE.
« Je lis l’interview de Jean-Marc Sauvé dans La Vie du n° 3871 et notamment « 35% ont 71 ans ou plus » – j’ai eu 71 ans il y a un mois – et la « victime » – avait 10 ans ou moins – : aussitôt une émotion douloureuse m’envahit et je sanglote irrésistiblement, longuement à la pensée de ce que j’ai dû subir à 9 ans et avant puisque le curé *** resta quatre ans dans mon village de 1953 à 1957. » exprime un autre témoin.
« Il y a eu un camp scout l’année de mes onze ans. Au mois d’août, j’étais encore louveteau, il est venu me chercher dans une tente un soir. Il m’emmenait dormir dans sa caravane. On y passait la nuit. […] Si les enfants le savaient, les adultes le savaient ».
Tous savaient, nombreux savaient et ont laissé faire. Souvent les victimes écrivent cette phrase et ils savent également que ceux qui savaient ne viendront toujours pas secourir, soutenir les victimes. Ils ont accepté de vivre avec ça sur leur conscience. Et, celle du prédateur ? Il sait, il sait très bien les actes qu’il a commis de manière récurrente et préméditée, organisée.
« Pour mon enterrement, je ne veux pas aller à l’église, trop de mauvais souvenirs d’un sale curé ***, il m’a violé toute mon enfance. » les noms des prédateurs s’écrivent enfin, il est quelque part inscrit en une reconnaissance, la justice de la vie. Celle des hommes n’existe souvent pas et les agresseurs savent très bien l’impunité dont ils bénéficient, la protection qui leur garantit de ne jamais à avoir à assumer les actes.
« Il est 6h30 du matin, le dimanche 20 juin 2004, j’ai rendez-vous avec la mort » écrit un témoin.
Quel jour ? Les victimes agressées, ainsi que celles violentées de manière récurrente n’ont plus ce jour, cette date et la douleur car celle-ci est toute leur vie, la date est : toute ma vie. Des violences sexuelles peuvent être vécues durant l’enfance et/ou l’adolescence et alors un prédateur qui repère les personnes vulnérables, les personnes traumatisées par un prédateur ayant impacté leur jeunesse, saura imposer une emprise sans précédent et blesser, saccager la vie de sa proie qu’il ne choisit pas au hasard.
Puis, il y a l’amour volé où l’horreur d’un agresseur va jusqu’à manipuler avec cette voix hypnotique une victime en état de sidération et lui dire, « je t’aime », « C’est parce que je suis fou d’amour pour toi. ». Et, ces paroles de mensonges, violent encore. La victime le sait, « Non, ce n’est pas ça l’amour – non ce n’est pas ça aimer », « Alors, je ne suis rien ? Ma vie ce n’est pas cela. Pourquoi est-il si violent avec moi ? Pourquoi ? »
Les souffrances se font ce présent et ces questions que se pose la victime, se font cet inlassable présent des décennies après. La douleur est intacte, le temps n’a rien consoler, c’est la force de vivre qui dépasse chaque jour pour survivre. Ne plus être libre et devoir dépasser chaque jour pour avancer, construire sa vie et donner une chance à nos rêves de vivre. La victime, est ce fantôme d’elle-même – elle était « la victime » et aujourd’hui elle doit être ce papillon qui s’envole grâce à ses propres forces, par son courage de se battre pour sa liberté.
« Tu m’as tout pris -Tu as volé ma vie – Tu m’as détruite » Une victime en témoignage à la CIASE
Ces mots de peine que lancent des milliers de victimes à leurs agresseurs qui jamais n’auront le courage des victimes, jamais ils n’auront le courage de les reconnaître. Puis, ils s’entourent toujours de personnes les soutenant et faisant qu’ils peuvent recommencer sans cesse sans prendre de risque. Puis, la société porte cette culture des violences, de la cruauté et les plus vulnérables sont les premières victimes du système destructeur qui nous enferme.
Lorsqu’une victime se confie, révèle ce qui lui est arrivé, elle est souvent méprisée, moquée puisque dans un système prédateur il n’y a pas d’humanité et cela n’est pas uniquement dans l’Église. Les complices d’un prédateur ne sont jamais inquiétés, ils apparaissent comme s’il était normal de mettre la tête de la victime sous l’eau . C’est ce prédateur qui se plaint du témoignage de celles et ceux dont il a détruit la vie par sa violence inouïe et qui n’a de cesse de les accuser, de les injurier de « folles », comme habitude des paroles de prédateurs qui cherchent par tous moyens de fuir la responsabilités de leurs actes criminels, qu’ils considèrent être un droit qui leur appartient !
« Mon petit, mon petit, on va prier la Vierge » et en même temps, il me masturbait. C’était le père Y. Le père Z, lui, c’était bien plus grave, c’est-à-dire qu’il repérait les enfants les plus esthétiques, les plus beaux. (…) Il disait « Tu es brillant, je te sens très proche de notre Seigneur, machin, il va falloir que je te voie en particulier, nous allons prier ensemble ». Il m’a tiré … une fois dans son antre, voilà. »
Des prédateurs se jouant de la religion, de ce pouvoir, du titre incontestable de « celui qui dit la parole de Dieu », qui instaure un lourd endoctrinement par une religion qui devient un outil et en laquelle les prédateurs ne croient absolument pas, comme en la Vierge dont le corps n’est plus celui d’une femme , mais d’une femme correspondant à la domination masculine.
« Il arrivait bien à flatter les adultes par sa présence, en partageant leur table, en discutant avec eux, en discutant de choses qui les épataient un peu, étonnés qu’un homme si instruit s’intéresse à eux. Il y avait une manipulation des familles », écrit une victime.
Les prédateurs sont des manipulateurs flattant, tirant l’orgueil d’adultes vers le haut pour les appâter, les « ferrer » et les amener là où ils veulent en jubilant ! Leur talent de manipulateur représente pour eux, leur intelligence.
L’impunité de ceux soutenant des prédateurs doit cesser
Si nous voulons mettre fin aux violences faites aux enfants, aux adolescents, aux jeunes adultes – nous devons aussi ne plus laisser aux prédateurs le droit de se fabriquer un environnement favorable à leur prédation.
Le président de la Conférence des évêques de France a suscité l’indignation de nombreuses personnes mercredi dernier en déclarant, « Le secret de la confession s’impose à nous et est au-dessus des lois de la République ». Mgr Éric de Moulins-Beaufort était alors au micro de France Info.
M. Dupont Moretti a déclaré vendredi sur LCI, « Si un prêtre reçoit en confession la connaissance de faits qui se déroulent, alors il a l’impérieuse obligation de mettre un terme à ces faits. S’il ne le fait pas, il doit être condamné. » Voilà qui est clair, mais cela sera-t-il entendu ? Une déclaration qui est la recommandation n° 43 du rapport Sauvé : « Un message clair indiquant aux confesseurs et aux fidèles que le secret de la confession ne peut déroger à l’obligation, prévue par le code pénal. (…) Signaler aux autoritaires judiciaires et administratives les cas de violences sexuelles infligées à un mineur ou à une personne vulnérable ».
Toutes les personnes qui soutiennent des prédateurs sont l’inadmissible, l’insoutenable, l’insupportable. Ils disent aux victimes que leur vie n’existe pas, que leur mémoire est morte, inexistante, que leur souffrance est un délire, et peuvent pousser une victime au suicide. Puis, par ces soutiens, un prédateur maintient une emprise sur une victime en grande souffrance. Secourir une victime, c’est sauver une vie ! Rien ne peut justifier de tenir secret les agissements d’un prédateur qui détruit une vie !
L’endoctrinement patriarcal qui domine derrière les portes lourdes de l’Église et qui fait énormément de dégâts dans une vie, dans la vie de victimes. Puis, les prédateurs sont ce mal absolu en constituant leur cour les protégeant, les courtisant. Tout leur monde est construit par la haine, le mensonge destructeur, la négation de la liberté. Les prédateurs ne respectent rien ni personne, ils jouent avec la vie d’autrui ! Et, quoique la victime fasse, ils l’accusent toujours comme le système accuse les plus fragiles, ceux bienveillants. C’est le système d’inversion niant la vie. La religion qui détourne le mot vie pour le manipuler, le modeler à sa convenance.
Secourir une victime, c’est sauver une vie

Le rapport Sauvé est d’une haute qualité et il réfléchit sur les possibilités permettant de protéger les enfants et adolescents. Il établit 45 recommandations et demande en premier à l’église catholique de reconnaître les victimes et que l’institution reconnaissent également sa responsabilité.
« Après ce qui s’est passé, il ne peut y avoir d’avenir commun sans un travail de vérité, de pardon et de réconciliation, et cela vaut pour l’Église comme pour les institutions civiles » souligne le rapport Sauvé.
Des mots d’une grande importance car ce qui est primordial, ce n’est pas de parler uniquement de la souffrance, c’est de l’écouter, c’est de reconnaître, d’apaiser, de réparer. Une victime qui témoigne fournit un effort considérable car elle traverse alors une douleur, elle traverse l’éprouvant chemin entrant dans la mémoire traumatique et elle le fait pour une chose, la liberté. Pour qu’il soit : Plus jamais ça !
Un témoignage est un appel : un appel pour vivre ! La société doit fonder son avenir sur cet appel de réconciliation, de paix, d’harmonie qui s’oppose au mental prédateur concevant le système actuel. On ne peut vouloir la paix si on ne lutte pas contre ce qui la détruit. On ne dit pas : nous sommes en paix quand des êtres humains sont en souffrance car ils ont été profondément blessés par un prédateur attaquant, prenant le droit de détruire une vie car le système lui permet de le faire.
Les coquelicots disparaissent des champs car la terre est contaminée par des produits chimiques venant apporter un profit et donc appauvrissant la paix. Une terre en souffrance qui produit un blé malade. Le système qui est conçu, est auto destructeur – il abîme le beau, la générosité, la paix et les conséquences sont non maîtrisables et pour des décennies. On comprend bien la souffrance de la terre et qu’elle nous lance un appel, qui signifie que nous devons profondément changer notre interprétation du monde et revenir à la paix qui l’habite.
Cette harmonie souhaitable pour que notre monde perdure doit également inspirer les institutions civiles comme le monde religieux. La Commission Sauvé fait part que souvent les faits de violences sexuelles, psychologiques, physiques vécues par les victimes étaient minimisés, et méprisés. Il doit être mis un terme à l’indifférence et mettre tout en œuvre pour indemniser les victimes à la juste hauteur de ce qu’elles ont subi, il doit être un objectif de réparations aussi bien dans l’Église, que dans les institutions civiles.
Puis, il est de rappeler que les victimes sont souvent seules à tout affronter et ce durant des années, comme elles ont affronté leur agresseur en étant seule et en état de survie. Ce qui est particulièrement traumatisant et nous devons comprendre que nombreuses victimes se sentent épuisées. Une victime confie à LiberTerra, « On se sent en même temps plein et vide » Plein de choses à dire, à faire et il est cet épuisement, cet anéantissement que provoque un prédateur par déjà le harcèlement, le chantage, les menaces, les mensonges qu’ils imposent à leur victime en plus des violences sexuelles. Le prédateur met en place toute une stratégie de manipulations qui effondre une personne. Les institutions civiles et religieuses imposant en plus un mépris, une indifférence, une culpabilisation, c’est tout simplement inhumain. C’est la double peine, la condamnation à vie de la victime, pendant que l’agresseur est protégé et donc impuni.
Comment est-ce possible de faire perdurer ce qui détruit un être humain ? Si la nature vit actuellement un bouleversement mettant notre humanité en péril, nous le devons à ce qui conçoit la guerre contre notre propre humanité. Les violences sexuelles sont à combattre de manière internationale et la France doit fournir un effort significatif, prendre des mesures concrètes, efficaces pour révolutionner sa culture, anéantir le patriarcat – pour répondre à l’appel de la paix que lancent les victimes de prédateurs, comme la terre nous lance cet appel.
L’être humain n’est pas isolé de la Terre – il fait partie d’elle, il est issu de la Terre, il est un membre d’elle. Nous faisons la guerre à la nature comme nous faisons la guerre à notre humanité.
La dimension de la réconciliation est très importante et cela ne peut être si les prédateurs n’assument pas leurs actes destructeurs, si la société ne reconnaît pas toutes les victimes de violences sexuelles. Un enjeu de haute importance nous fait face et c’est aujourd’hui que nous devons tous œuvrer pour la paix universelle.
Réparer : l’apaisement
« Dissiper les ténèbres » comme indiqué dans le rapport Sauvé, et revenir à la lumière pour le présent et l’avenir en ne laissant personne de côté, et en reconnaissant les victimes passées dans un rapport qui étudie les faits à partir de 1950.
Il est estimé dans l’Église entre 2 900 et 3 200 agresseurs, en sachant qu’un agresseur peut faire plusieurs victimes. Il en est de même pour les agresseurs n’appartenant pas au monde de l’Église. Des rapports scientifiques démontrent qu’un prédateur sexuel peut agresser de très nombreuses victimes. Il est également plusieurs types de profils d’agresseur et cela également dans les violences sexuelles commises par un partenaire intime, dans les cas de viols conjugaux, où il est des prédateurs compulsifs multirécidivistes qui ne cessent jamais d’agresser durant des années et qui peuvent avoir plusieurs proies. Des prédateurs qui sont dans tous les milieux sociaux et aussi dans l’Église.
Il est alors difficile de mesurer l’ampleur des dégâts que causent un prédateur tant il peut commettre de violences sur différentes victimes. Ce qui en ricochet constitue un nombre de réparations à honorer par l’Église et les institutions civiles qui est considérable. La hauteur des indemnisations pour les victimes de prédateurs au sein de l’Église s’élève à plusieurs milliards pour répondre au droit à la réparation, un dû et non « la charité » soulignent des victimes – plus de 210 000 victimes doivent bénéficier du droit de réparation.
À la suite de la publication du rapport Sauvé, la Conférence des évêques de France propose un financement des indemnités par une instance indépendante constituant un Fonds de dotation estimé à 5 millions d’euros. Une somme qui pourrait être constituée par « l’argent personnel » des évêques ou par des dons faits par les fidèles. De plus, Mgr de Moulins-Beaufort explique sur Franceinfo que depuis 2018, l’Église a décidé « qu’il y aurait une dimension financière à cette affaire » pour reconnaître la souffrance des victimes, mais « Nous nous sommes préparés mais nous n’avons rien de côté ». Une solution critiquée par le CIASE qui souhaite une réparation financière individuelle et non forfaitaire et établit par un organisme indépendant.
Le Rapport Sauvé faisant 45 recommandations à l’égard de l’Église pour mettre fin aux violences sexuelles qui sévissent entre ses murs. « Au-delà de ce triple défi de la responsabilité, de la reconnaissance et de la réparation, la commission propose (…) un plan d’action vigoureux dans les domaines de la gouvernance, de la sanction, de la formation et de la prévention ».
Au-delà, c’est toute la société qui doit réfléchir pour changer durablement et permettre enfin le droit pour toutes les victimes d’obtenir reconnaissance et réparation. Comme il est essentiel de construire un futur sans pandémie de violences, de souffrances pour les plus vulnérables.
© Fédora Hélène

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